Mort surprise.

Roche, obscurité, , désert... mort... Voilà les mots qui venaient un à un dans l'esprit du Luxray à chaque pas en ces lieux sinistres : la terre désolée.
Il n'y venait pas souvent étant donné qu'elles appartenaient aux rénégats, eux-même qui n'étaient pas des pokémons très fréquentables. Seulement cette fois-ci, on avait proposé un service au jeune mercenaire, il était chargé de tuer quelqu'un, la nièce d'une rénégat. Il n'acceptait pas toujours les missions de ce genre, à vrai dire, tuer n'était pas un réel plaisir pour lui, c'était sans goût, sans saveur. Ennuyeux. Néanmoins, il était parfois contraint d'accepter, lui qui n'était qu'un vagabond sans domicile et qui n'avait comme seule source de revenue des tâches ingrates de ce genre à accomplir. Il fallait bien qu'il se nourrisse, qu'il ait de quoi vivre. Par chance, la Phyllali qui lui avait demandé ce travail lui avait proposé une somme alléchante en récompense, qu'il n'avait pu refuser.
La mission était simple : aller aux terres désolées à un certain moment de la journée. Tuer la femelle qui s'y trouverait. Elle n'avait pas donné plus de détails, et quelle importance. Il avait toutes les informations nécessaires, le reste l'importait peu. Après tout, il ne faisait pas ces sales boulots pour en savoir plus sur les vies inintéressantes de ceux qui l'employaient, non seulement ça ne le regardait pas, mais en plus de cela il s'en fichait, alors à quoi bon. Seule la récompense était importante.
Pressant le pas sur ce sol rocailleux, il arriva rapidement au point de rendez-vous. Il commença donc à humer l'air, cherchant la présence de sa petite victime. Il ne mit pas longtemps à la sentir. Au qui-vif, il se mit à plat ventre sur le sol, prêt à se jeter sur sa proie. Il usa de son ouïe afin de repérer sa position. Elle ne fut pas bien difficile à trouver : le pokémon se parlait tout seul. Ainsi, caché derrière un rocher, il attendit le bond moment. Puis soudain, avec une rapidité et une agilité éblouissante et poussant un rugissement terrible, Seth bondit de sa cachette et atterrît  sur une petite boule de poil marron, dont la tête faisait peut-être la taille de sa patte en surface.
Il observa la petite un instant, une evoli tout ce qu'il y avait de plus simple. Il n'imaginait pas vraiment avoir affaire à ce genre d'individu, à vrai dire, il s'attendait à une petite peste prétentieuse et invivable. Après tout, c'était une rénégat. Et pourtant, elle semblait... Différente. Habituellement, il l'aurait tué tout de suite en l'étouffant sous son poids, mais il voulait d'abord voir sa réaction, ce qu'elle aurait à dire. Mais si elle se débattait, il n'hésiterait pas à sortir les griffes pour la calmer.

« Relâchez-moi... S... S'il vous... Plaît... »

Tiens ? Ça c'était une surprise. Elle ne cherchait pas à se défendre, ni même de se débattre. À vrai dire, elle devait se douter que si elle tentait la moindre chose, il la tuerait sans aucune pitié. Elle semblait un minimum intelligente, ou du moins réaliste. Quoiqu'il en soit, elle lui demandait pitié. Avait-il l'air d'être un être compatissant ? Semblait-il capable d'un tel geste de bonté ? Peut-être ne le voyait-elle pas bien, après tout, elle ne faisait que pleurer, difficile de voir dans ces conditions. Cependant, il n'allait pas la laisser partir comme ça. Il en avait pour sa récompense, mais il n'allait pas l'assassiner ainsi. Il fit un léger rugissement, semblable à une grognement, en approchant ses crocs de le bestiole. Et maintenant, semblait-il être un pokémon s'apitoyant sur le sort des autres plus que sur son propre sort ? Croyait-elle encore à ce que ses parents lui avaient raconté, qu'avec le mot magique "s'il vous plaît" on pouvait tout obtenir ?

« S... S'il v... Ou... Vous... P... Plaît...  »

Visiblement oui. D'un froncement de sourcil, il continua de l'observer, cessant d'essayer toute intimidation. Enfin, il n'avait pas besoin d'essayer de paraître intimidant, il l'était déjà de nature, mais là n'était pas la question. C'était plutôt : qu'est-ce que cela signifiait ? On l'avait chargé de tuer une jeune rénégat, mais il ne s'attendait pas à être face à une enfant aussi faible et pitoyable et, qui plus est, qui ne faisait que pleurnicher. À vrai dire, il avait sa part de responsabilité en n'ayant pas cherché à avoir plus de renseignements sur sa victime, mais c'était son mode opératoire habituelle. On l'employait, il tuait, on le payait et on en parlait plus, c'était la règle : ne jamais parler des morts.
Cependant, il n'avait jamais tué d'enfants. Tout simplement parce qu'on ne lui avait jamais demandé, cela va de soi, et c'était normal. Mais pourquoi diable cette Phyllali souhaitait tuer sa nièce qui, d'après le luxray en la voyant gémir pathétiquement sous la pression de sa patte, ne risquait pas de lui faire quoique ce soit. Et voilà. Il venait d'attiser sa propre curiosité. Il lâcha un râle et libéra son emprise sur le minuscule renard, enfin, minuscule comparée à lui. Cependant, il se tint droit face à elle afin de la regarder de haut, signe de dominance. C'était extrêmement rare qu'il faillisse à une mission, pour ne pas dire impossible. Et c'était inimaginable qu'il puisse laisser s'échapper une personne. À vrai dire, il ne la laissait pas vraiment partir, du moins, il lui laissait le choix. Laissant peser son regard sur elle, il commença à se lécher la patte de façon nonchalante, pour finalement déclarer :

« Tu peux rentrer chez toi si tu le souhaites. Tu n'auras qu'à dire à ta tante que tu as attendu mais que personne n'est venu. Ne pense même pas à mentionner cette rencontre, est-ce bien clair ? »

Il ne souhaitait pas tuer la petite, il n'était pas un tueur d'enfant. Néanmoins, il ne comptait pas salir sa réputation pour un être aussi minable, il fallait donc que tout cela reste entre eux. Et si elle parlait un peu trop, là, il agirait en conséquences...

« D'accord messieurs Luxray... Mais j'aimerais quand même savoir pourquoi vous ne m'avez pas... Assassiné... »

Cette petite n'avait pas l'air de réaliser la position dans laquelle elle était. On venait de tenter de l'assassiner, le coupable l'avait finalement graciée et que faisait-elle ? Elle tapait la causette à son bourreau, plutôt que de prendre les pattes à son cou. C'était totalement imprudent de sa part, il aurait pu la tuer au moins cinq fois et de dix façons différentes à partir de l'instant où il lui avait dit qu'elle pouvait rentrer chez elle. Mais il ne l'avait pas fait, et il ne le ferait pas. Peut-être l'avait-elle compris, au fond. Oui, ce devait être ça.
Cependant, ce qu'elle ne comprenait pas, c'était pourquoi il la laissait partir. À vrai dire, il ne le savait pas plus qu'elle. Il n'avait jamais fait cela auparavant, de la même manière qu'il n'avait jamais eu ce genre de victime. C'était peut-être ça, la clé : il ne pouvait se résoudre à tuer un être aussi jeune et faible. Mais avec cette idée en tête, c'était probablement lui le faible dans cette histoire, incapable de tuer une Evoli qu'il venait de rencontrer, même avec une coquette somme en récompense de cet acte ignoble.

« Et puis, je suis sûr que ma tante a mis un paquet de pokedollars dans mon assassinat... »

Il poussa un grognement à l'écoute de cette remarque. C'est vrai qu'il y en avait un bon paquet, et elle s'en doutait en plus. Il fallait croire que la relation entre cette femelle et sa tante n'était pas des moindres, pour qu'elle se fasse autant à sa propre mort. Il n'était pas enchanté à l'idée de devoir laisser filer autant d'argent, mais, d'après lui, mieux valait avoir le ventre vide que la conscience pleine.
Il posa son regard sur elle. Elle tremblait comme une feuille, baissait la tête, se dandinait. Il ne lui avait toujours pas pris la peine de lui répondre, elle était totalement effrayée, mais elle était toujours là. Elle déclara finalement d'une toute petite voix :

« Oubliez ce que je vous ai demandé, messieurs Luxray. Je vais aller retrouver ma tante, avant qu'elle n'envoie un autre assassin... »

Difficile de dire si elle était plus en sécurité auprès de sa tante ou ici à pleurer de peur en voyant celui qui était normalement chargé de la tuer. Il poussa un soupir, et lui répondit enfin, considérant de toute manière qu'elle n'était pas un danger pour sa réputation, ou même pour sa vie :

« Contrairement à ta tante, je ne suis pas un tueur d'enfant. »

Il avait déclaré ça d'un ton dur et grave, incitant ainsi la petite Evoli à rester un instant pour l'écouter, et éventuellement lui répondre si elle avait son mot à dire. Il avait bien comprit que si elle rentrait chez elle, elle se ferait tout de même tuer par sa tante ou un de ses sbires à un moment ou un autre. À partir de là, le meurtre ne le concernait plus et il était tranquille. Du moins, c'est ce qu'il tentait de se répéter au fond de lui. Mais il savait qu'à un moment donné, il se mettrait à repenser à cette journée, à se poser des questions : "Est-elle morte maintenant ? Comment a-t-elle été tuée ?". Il secoua la tête, chassant ces mauvaises idées. La pauvre enfant n'avait qu'une solution :

« Enfuis-toi. Fais-toi passer pour morte. Cache-toi là où personne ne te trouvera, un endroit où tu seras en sécurité. Avec un peu de chance, tu apprendras à devenir plus forte, et peut-être même pourras-tu te charger du cas de ta tante... »

Il n'était en réalité pas tellement sûr de la dernière partie, mais le mieux était probablement de l'encourager un minimum. Oui, c'était mieux ainsi d'après lui, lui qui n'avait eu aucun soutien lorsqu'il avait son âge, seulement des personnes lui répétant qu'il était minable et faible...
Broyant du noir en repensant à ses souvenirs et irrité à l'idée de se comparer à la pokémon face à lui, il se leva et lui tourna le dos, s'apprêtant à partir de son côté, ne cherchant même plus à savoir si elle prendrait ses conseils en compte.

« Je ne peux pas m'enfuir ! »

Elle avait finalement osé lever le ton, faisant pivoter les oreilles du félin afin qu'il l'écoute tout en lui tournant le dos de façon méprisante. Cet élan de courage ne dura pas longtemps étant donné qu'elle reprit finalement de sa petite voix :

« Enfin... si je m'enfuis... Ma tante me retrouverait... J'ai déjà essayer de m'enfuir, a plusieurs reprise, mais je n'avais... Pas ré... réussis... »

Alors comme ça elle avait déjà tenté ? D'un côté, cela rassurait Seth. Elle n'était pas totalement idiote au fond, elle savait que rester auprès de la Phyllali était du suicide et elle avait tenté d'y remédier. Mais évidemment, que pouvait bien faire une petite Evoli comme elle, frêle et seule contre tous. Tiens, il venait de mettre la patte sur quelque chose : la solitude de la femelle. Elle ne devait probablement avoir personne vers qui se tourner ou même sur qui compter. Pour un être aussi jeune, elle n'avait déjà pas la vie facile. Encore une fois, il commençait à revoir le Seth adolescent qu'il était, un avorton.

« Et puis, si je m'enfuis, ma tante s'en rendra compte... Elle se rendra aussi compte que sa nièce n'a pas été tuée... Par celui qu'elle a payé... Et je n'ai pas envie qu'elle essaye de vous tuer... »

Voilà qu'elle se souciait même de la sécurité du lion, celui qui, je tiens à le souligner, avait faillit l'étouffer quelques minutes plutôt. Elle semblait d'une naïveté sans fin, s'en était affligeant. Sa gentillesse et son empathie devait bien lui jouer des tours à certains moments, en tout cas ça lui en jouerait. Ou alors, elle ne voulait pas avoir de comptes à rendre, mais bon, ce ne devait pas être son genre.
Aussi, elle supposait que sa tante allait le tuer. Cette remarque fit qu'il ne put s'empêcher de se tourner enfin vers elle, voyant ainsi qu'elle baissait la tête, les yeux embués de larmes. Il se rassit au sol, droit, et la regarda de haut pour déclarer d'un ton un peu vaniteux :

« Ai-je l'air d'être une personne si facile à tuer? »

Il ne doutait pas une seconde pouvoir perdre face à la Phyllali. Il était puissant, agile, rapide et malgré le l’infériorité de son type, il en mettait sa patte à couper qu'il écraserait la renarde sans difficultés. Ainsi, il poussa un soupir et déclara d'un ton ferme :

« J'irai voir ta tante et je lui confirmerai la réussite de la mission. Si elle demande ton corps, je dirai que je l'ai jeté dans un ravin. Pendant ce temps, tu n'auras qu'à t'enfuir comme je te l'ai dit. Ou alors préfères-tu réellement mourir ? »

Elle avait l'air têtue et tellement effrayée par sa tante qu'elle ne s'imaginait même pas pouvoir lui échapper un jour. Mais à force de ne pas y croire, cette pensée risquait de devenir un fait. Il fallait qu'elle lui fasse un minimum confiance, bien que ce soit une chose dure. Enfin, ça l'aurait été si elle était comme lui, mais en vu de sa crédulité, cela ne devait pas être son cas.

Le matin s'était passé calmement. Une mission par ici, une mission par là. Rien de très important, la routine habituelle. Mais sur les coups de midi, une demande étrange lui était parvenue. Un rendez-vous rapide dans un coin reculé du château, pour affaire de la plus haute importance. Cela avait éveillé la curiosité du Pokemon. Une affaire des plus urgentes. Ce sont celles qu'il préfère.

Il avait alors retrouvé le commanditaire dans un endroit isolé peu après. Il ne fut pas surpris finalement, de découvrir son identité. Par contre, sa mission était des plus étonnantes. Mais c'était avec un immense plaisir non caché qu'il avait accepté. C'était un boulot bien payé pour ce que cela demandait comme effort. Comme quoi, il y a des jours où on gagne beaucoup en ne faisant presque rien.

Ainsi, il avait suivi ses traces toutes l'après-midi. Puis il avait observé silencieusement la scène. On était rendu à la fin de l'après-midi, juste avant le début de soirée. Dans les Terres Désolées. Un endroit mal famé. Un endroit dangereux. Un endroit parfait pour un assassinat. Ce qu'était censé faire un Luxray.

Mais de toute évidence, le Mercenaire ne voulait pas effectuer cette mission. Comme quoi, sa cliente avait bien fait de l'engager pour surveiller et le cas échant, remplir la part du contract du Pokemon électrique. Un sourire mauvais étira ses babines. Il allait bien s'amuser !

Avec discretion et rapidité, il glissa jusque sa proie. Il en était presque sur les deux pokémons qui continuaient à parler. Il se redressa alors, et prit la parole.

"Si tu ne t'acquites pas de ta tâche Mercenaire, laisssse moi faire. Je vais m'occuper de cette petite pessste. Si elle ne veut plusss vivre, libre à elle. Je m'en vais la délivrer sur le champ."

De toute manière, le pokémon marron devait bien comprendre que si elle voulait vivre, il lui faudrait s'échapper loin de sa Tante. Sinon, cette histoire recommencera à nouveau, et encore, et encore jusqu'à l'acte final. Ouvrant grand la gueule, crochets en avant, le Seviper se propulsa avec force sur la petite Evoli.

« Elle vous demandera tout de même mon corps... Elle aurait trop peur que la seule personne qui connaisse son secret reste en vie... »

Alors la raison de tout ça n'était autre qu'un secret à garder. Les secrets ont un prix, ils ne sont pas gratuits. Pas plus aujourd'hui qu'hier, Seth l'a toujours su. En l’occurrence ici, le prix à payer n'était autre que la mort, radicale pour bénéficier du silence d'un individu qui en saurait trop. La pauvre evoli était cet individu, elle semblait savoir beaucoup trop de choses sur ce que sa tante pouvait avoir à cacher, cela en devenait une évidence à présent aux yeux du Luxray. Ces mêmes yeux qu'il fit lever aux ciel, signe de son exaspération face à l'entêtement de son interlocutrice qui continuait de se morfondre et de désespérer bêtement au lieu d'agir.

« Ma tante ne vous lâchera pas tant qu'elle n'aura pas vue mon corps... Il vaut peut-être mieux que je meurs... Vous n'aurez pas de problème, ma tante serait heureuse... »

Il se fichait des problèmes, il était un vagabond mercenaire sans but, sans lois, sans rien. Qu'est-ce qu'il avait à perdre de toute manière. Il n'avait que faire qu'on soit à ses trousses, ce n'était pas parce qu'il n'avait pas eu l'audace de tuer une gamine qu'il ne pourrait pas tuer des dizaines et des dizaines d'agresseurs. Puis, il n'avait que faire du bonheur de sa chère tante qui lui était une personne aussi inconnue que répugnante.

« Et puis je ne manquerais à personne... »

Cette phrase lui fit l'effet d'un coup de fouet au visage. Là, son esprit s'embrouilla. Il croyait voir devant lui, à la place d'une petite évolie, un jeune Luxio désemparé, seul et malheureux. Lui. Une fois de plus, il se revoyait à travers la renarde, bien que tout les opposait dans leurs caractères. Il avait vécu ce même sentiment de solitude. Non, pire que ça : il avait eu cette même pensée, mot pour mot, lorsqu'il avait quitté sa famille. Qu'il n'allait manquer à personne. Il n'avait manqué à personne. Sinon, pourquoi était-il seul encore aujourd'hui ? Une mère, ou du moins une famille, un minimum responsable serait partie à la recherche de sa progéniture quoiqu'il lui en coûtât, c'est ce qu'il pensait. Mais personne n'était venu le chercher.
Qu'allait-il donc arriver à cette petite ? Le contexte était différent, on voulait sa mort. Enfin, si Seth avait perdu la vie dans la période où il était toujours avec sa famille, nul doute que celle-ci n'en aurait été aucunement affectée. C'est pourquoi il était partit, on ne se souciait pas de lui. Mais elle, cette petite pleurnicheuse qui n'avait pas même le courage de se défendre, ô grand jamais qu'elle ne tenterait la moindre petite escapade sans autorisation, ça tombait sous le sens. Il commença à se demander si la situation dans laquelle elle était n'était pas pire que celle qu'il avait vécu : elle était obligé de cohabiter avec sa tante, visiblement sa seule "famille", qui cherche sa mort. Seule, elle n'a pas même le courage de s'opposer à quiconque l'insulterait. Ainsi, aucune chance qu'elle ait l'idée de partir sans demander son reste, comme avait pu le faire le brun. Et pourtant, c'était la seule issue pour vivre, elle devait bien le comprendre ça, non ? Elle devait surtout comprendre que seule, elle était faible et ne pouvait rien faire...

Il pivota ses oreilles brusquement vers l'arrière, croyant entendre un bruit. Ses pensées se bousculant, il n'avait pas remarqué jusqu'à maintenant la présence d'un autre pokémon. Tentant de cacher sa surprise, il tourna simplement les yeux vers la droite, cherchant à se montrer imperturbable. Il aperçut alors un Séviper, tout ce qu'il y a de plus commun, affichant un air mauvais. Il n'était pas là pour de bonnes intentions, cela se lisait clairement sur son visage. Il n'avait pu sentir l'odeur du serpent précédemment, et donc le repérer, par le simple fait que les pokémons de son espèce n'avait pas d'odeur particulière, si ce n'est celle de leur venin, qui était donc difficilement détectable. Odeur d'ailleurs qui commença à lui emplir les narines lorsque le pokémon commença à parler, dévoilant sa langue toxique :

« Si tu ne t'acquites pas de ta tâche Mercenaire, laisssse moi faire. Je vais m'occuper de cette petite pessste. Si elle ne veut plusss vivre, libre à elle. Je m'en vais la délivrer sur le champ. »

Sans crier gare, le lézard commença à se jeter sur sa victime, prête à en finir avec toute cette histoire. Seulement, forcé par une pulsion inconnue, le lion poussa un rugissement et se jeta sur le pokémon poison avant qu'il ne commette l'irréparable. Il aurait très bien pu le laisser finir le boulot à sa place et le tuer ensuite afin d'hériter de la récompense, mais étrangement, il ne souhaitait plus du tout la mort de la quadrupède, au contraire. Il voulait qu'elle vive. Ainsi, il roula sur plusieurs mètres en mordant son adversaire, prenant soin d'esquiver les coups de dents ou de queue, afin de ne pas se faire empoisonner. Il n'avait pas pu voir si l'enfant était touchée, il se contenta donc de lui ordonner en hurlant :

« Pars, loin ! Et cours, sans te retourner ! »

Se débattant du mieux qu'il put, le Séviper commença à glisser entre les griffes du félin. Ce dernier était bien décidé à en finir avec lui, mais avant qu'il ne put faire quoique ce soit, l'adversaire lui planta violemment le bout de sa queue tranchante dans la cuisse, y répandant ainsi du venin. C'était mal partit pour lui, il était désormais empoisonné. Alors le ciel devint soudainement plus gris qu'à la normale, le félin poussa un long grondement tout en faisant frapper un violent éclair sur son ennemi qui se tordit dans tous les sens au moment de l'impact, pour finalement s'immobiliser lorsque ce fut finit. Mort.
Seth se releva non sans mal de ce combat, victorieux. Mais empoisonné. Il tituba un instant lorsqu'il voulut marcher, sa vue commençait à se troubler, il se sentait faible. Voulant avancer, il boita ridiculement, sa cuisse ruisselante de son sang et du venin auquel il était désormais mélangé. Il allait devoir soigner ça, une baie pêcha serait donc le bienvenue. Mais avant cela, il tenta tant bien que mal de trouver Herz du regard. Était-elle bien partit comme il lui avait ordonné ?

Des bruits de pas martelant le sol atteignirent ses oreilles, devenant de plus en plus proches. Il secoua la tête en clignant des yeux afin de reprendre ses esprits. Il avait quelques vertiges à cause du poison et se sentait faible, usant d'efforts monstrueux pour se tenir sur ses quatre pattes, continuant de saigner abondamment au niveau de la cuisse. La voix de celle qu'il cherchait tout juste du regard retentit :

« Allongez-vous ! »

Visiblement, elle ne lui demandait pas son avis. Il fut un instant surprit par l'assurance qu'elle venait d'adopter pour oser lui donner l'ordre de s'allonger, mais n'eut d'autre choix que d'obéir à la petite qui l'encourageait à se coucher sur le côté. De toute manière, il avait déjà bien du mal à rester debout. Puis, face à son museau, il aperçu soudainement une baie Sitrus à moitié pourrie.

« Désolée, je n'ai pas trouvé mieux... »

Il la renifla quelques secondes, ignorant si la baie était encore comestible. Bien sûr, c'était soit il mangeait cette baie, s’intoxiquait et mourrait, soit il la mangeait, retrouvait des forces mais ne guérissait pas le venin et mourrait. Il avait l'embarras du choix. La seule solution était évidemment de trouver une baie Pêcha aux alentours, chose qui risquait d'être extrêmement difficile dans le contexte actuel : un luxray incapable de faire le moindre effort, une evoli pouvant se faire tuer à tout instant et des terres où le moindre coin d'herbe était une découverte sensationnelle. Il leva alors les yeux vers la petite Evoli et vit alors quelque chose qu'il n'avait pas remarqué avant.

« Comment tu t'es fais ça ? Le Séviper t'a touchée ? »

Il commença à renifler la blessure de la renarde, cherchant à y déceler la moindre goûte de venin. Elle ne semblait pas avoir été gravement empoisonnée, mais risquait tout de même de perdre son énergie rapidement. De plus, il se doutait bien sûr que la blessure devait être douloureuse pour elle. Le mieux était qu'elle reprenne des forces sans se fatiguer. En mangeant la baie. Il poussa donc le fruit vers l'enfant, l'incitant à le manger. Il allait trouver un moyen de récupérer un minimum de force.
Il commença donc à se relever non sans mal mais sans rien lâcher. Il ne comptait pas mourir ici de toute manière, pas comme ça. Il s'élança en boitant vers le rocher qui se trouvait là depuis le début, celui derrière lequel il s'était caché lorsqu'il avait voulu tuer l'evoli. Il l'escalada difficilement, manquant de tomber à deux reprises, et s'y coucha, pour finalement tourner la tête vers la marron :

« Ne t'approche pas. Mieux : recule.»

Il avait lâché ça d'un ton sec afin de l'effrayer un peu, dans le but qu'elle obéisse vraiment. Mais la raison était que ce fut simplement pour sa sécurité. Il attendit donc durant de longues secondes sur ce gros caillou, sans bouger. On aurait pu croire ainsi qu'il attendait que la mort vienne le chercher, mais la vérité était tout autre.

L'avantage qu'il avait pu trouver aux Terres Désolées était le climat : nuageux, sombre... Orageux. Oui, de nombreux éclairs frappaient parfois sur ces terres, rajoutant un facteur dans la liste des raisons pour laquelle ce territoire était effrayant et peu fréquenté par les gens saints d'esprit. Alors, les parties jaunes du corps de lion -les pattes, les griffes, les yeux et le bout de sa queue- se mirent  à briller intensément, signe que le nombre de charges électriques dans l'air commençait à augmenter. Augmenter, augmenter... Jusqu'à ce qu'un éclair frappa de plein fouet l'animal l'espace de cinq secondes. Puis plus rien. Plus rien à pars un Luxray revigoré.
Ce dernier se releva désormais en bien meilleure forme. Il allait pouvoir marcher et même attaquer sans problème maintenant, mais le poison était bien toujours là. Il allait devoir être prudent et ne pas user de ses forces trop vite, ou le venin se répandrait rapidement dans son organisme. Il descendit donc de la plateforme et retourna vers l'enfant.

« Je me sens mieux, mais je ne suis pas totalement guéri. Allons chercher de quoi nous soigner, des baies pêcha ou des baies prine feront l'affaire. Le mieux serait d'aller dans la forêt enchantée en chercher, elle se trouve de l'autre côté de la forêt morbide, pas très loin donc. Et si nous ne trouvons pas ce que nous cherchons, nous pourrons toujours aller au paradis fruité, non-loin de la forêt enchanté.»

Peut-être ignorait-elle de quels lieux il parlait après tout, elle était renégat et ne devait pas sortir souvent. Mais bien sûr, lui était vagabond et n'avait donc aucun soucis à se faire de ce côté là, il connaissait le royaume comme sa poche. Il commença donc à marcher, pas trop vite pour ne pas se fatiguer, lui et la evoli qui allait devoir le suivre. Il en lui donnait pas vraiment le choix, il la tirerait de force s'il le fallait, elle ne pouvait pas rester là, ni retourner au château. Donc elle devait le suivre, ça tombait sous le sens. Il jeta un coup d’œil derrière lui afin de voir ce qu'elle faisait, en réalisant soudainement qu'il ne connaissait toujours pas son nom.

Comme si elle avait miraculeusement lu dans ses pensées, elle vint se présenter en le stoppant net dans sa marche après l'avoir rattrapé en courant, chose qu'il allait lui faire remarquer plus tard non sans la réprimander. Il ne valait mieux pas qu'elle court si elle ne voulait pas être encore plus empoisonnée. Quoiqu'il en soit, elle l'avait arrêté pour enfin lui demander son nom tout en lui donnant le sien :

« Désolé, mais avant qu'on parte, j'aimerais tout de même connaître votre nom... Après tout, ça ferait bizarre de tous le temps vous appelez monsieur Luxray ! Herz, enchantée ! »

Elle lui tendit alors la patte, signe dont il ignorait la signification. Que faisait-elle au juste ? Qu'était-il censé faire, lui ? Son éducation était réduite à de simples signes de têtes en salutation, ou un vague "bonjour", c'est tout. Ainsi, il passa à côté d'elle en ignorant son geste, se contentant de répondre :

« Appelle-moi... Connor. »

Il se sentait légèrement idiot de rester sur ses gardes face à cet être plutôt minable, mais Seth était Seth après tout, la méfiance incarnée. Ainsi, il avait sortit ce faux nom par précaution, car après tout son nom n'était pas totalement inconnu aux oreilles des pokémons, son visage non plus d'ailleurs, mais il était un peu moins répandu tout de même. Ce que les gens connaissaient bien était surtout son titre : l’Éclair Noir, un surnom laissant rêveur ou apeuré. Marchant d'un pas lent, il commença à méditer sur le prénom de la petite. "Herz", ça sonnait assez étrange, cela semblait peu commun. Il n'était pas sur de savoir le prononcer correctement, sa langue risquait de fourcher, ce qui allait être ridicule pour un lion de sa prestance. C'est pourquoi, il songea plutôt à l'appeler quelque chose comme "petite". C'était simple et ça lui correspondait bien, il fallait dire qu'elle n'était pas très grande à côté de lui.

« Eh... Petite. -il fit une pause, constatant que cela sonnait définitivement beaucoup mieux que "Herz"- Évite de courir, le poison risque de se répandre bien plus vite que prévu dans ton sang. Contente toi de marcher. »

Ils commencèrent à pénétrer dans la forêt morte, qualificatif qui lui correspondait parfaitement bien. Par chance, le félin savait comment s'y repérer et arriver à la forêt enchantée sans trop de problèmes. Cela risquait de durer une bonne petite marche, mais ils avaient une marge de temps assez large pour survivre de l'empoisonnement, normalement. Sans peur, il avança droit devant lui, imperturbable. Il avait connu pire à vrai dire et avait déjà traversé cette forêt. En revanche, il mettait sa patte à couper que l'enfant qui l'accompagnait n'était pas rassurée le moins du monde. Pourtant, elle n'avait plus grand chose à craindre, il était là pour l'aider après tout. Il en profita pour lancer rapidement la discussion, bien qu'il eut plutôt coutume d'être silencieux, il se dit qu'elle aurait eu moins peur s'il lui parlait :

« Au passage, évite de me vouvoyer. C'est inutile d'utiliser des marques de politesses ou de courtoisie avec moi, je ne suis pas quelqu'un à qui on doit faire des courbettes. »

C'est sûr qu'en temps normal, les mercenaires était plutôt craints, moins que les Marchombres certes, mais suffisamment terrifiants pour ne pas être fréquentés. On les considérait avec mépris, pire, on les jugeait sur leurs actes. Et ça, Seth ne le supportait pas. Il soupira donc, continuant à marcher. L'environnement était sombre et puait la mort, le luxray crut voir quelques carcasses à certains endroits, sûrement des malheureux qui s'étaient perdus et que le temps avait laissé au votournos. Il y avait également beaucoup de branchages, dû au fait que les arbres pourrissaient et perdaient leurs branches. Il était facile de s'emmêler ses pattes entre les bouts de bois et les racines sortant du sol, Seth crut donc bon de prévenir :

«Fais attention où tu mets les pattes surtout. »

Elle s'était déjà fais assez mal pour le moment, mieux valait ne pas empirer les choses. D'ailleurs, sa blessure semblait toujours ne pas avoir guérie, le jeune mâle en vint à se demander si elle avait bien mangé la baie comme il le lui avait fait comprendre...

Seth avait laissé échappé un sourire à la remarque de la renarde lorsqu'il lui avait dit de le tutoyer. Elle commençait à montrer une image un peu plus joyeuse que celle qu'il avait pu voir jusqu'à présent, au fond, cela lui fit plaisir. Il était assez heureux de constater qu'il lui arrivait de rire ou de se sentir bien. Quoique bien était un faible mot pour la qualifier à l'instant, étant donné qu'elle commençait à tituber. C'était soit le poison, soit la fatigue, soit la fatigue dû ou poison. Il fallait dire qu'il commençait à se faire tard, bien que le nuit ne tombât pas encore.

« Ne vo... t'inquiète pas. Et puis de toute façon, si je me gamelle, ça n'aggravera pas mon état, je pense... »

Il roula des yeux face à la naïveté de l'enfant. Bien sûr que si cela aggraverait son état, elle avait déjà du mal à tenir debout. Il s'arrêta donc, laissant la petite rattraper la distance qui les séparait car, même s'il s'efforçait de marcher lentement, elle n'arrivait même pas à suivre la cadence. Quand elle fut à sa hauteur, il déclara :

« Tu n'es vraiment pas croyable... Je crois que tu ferais mieux de dormir, je vais te porter le reste du trajet. Ah et je ne te demande pas ton avis en fait : dors. »

Il ouvrit la gueule et attrapa la petite par la peau du cou. Cette-dernière ne mit pas longtemps avant de s'endormir, elle était épuisée. C'était naturel après tout, elle avait eu une bonne dose d'émotions aujourd'hui en manquant de se faire tuer à plusieurs reprises. Désormais, elle était plus ou moins en sécurité avec lui, du moins durant un certain temps. Le lion vint à se poser une question à ce propos : qu'allait-il se passer après qu'ils soient arrivés au paradis fruité ? Bien sûr, ils allaient commencer par se soigner. Mais ensuite ? Seth continuerait à errer en offrant ses services de mercenaire, voyant comment la tendance politique évoluerait, reine noire ou reine blanche...
Mais la petite Evoli dans tout ça ? Il ne pouvait pas la confier à son sort après tout ce qui c'était passé, et puis, elle ne tiendrait pas longtemps en vie toute seule. Le mieux était de la confier à une famille primérienne, des gens biens. Oui, il songea alors que c'était la meilleure solution. Après tout, il n'était pas là pour jouer les nounous, il se sentait déjà assez idiot de porter la evoli dans sa gueule, tel une maman et son petit. Chassant ces idioties de son esprit, il se concentra sur sa route, bien décidé à arriver au plus vite et en vie au paradis fruité.